Je publie ce texte de mon amie
Dominique Paulhiac. Il m’a paru
intéressant de vous donner à lire
une autre poésie, une autre expression,
une autre sensibilité.Dominique a consacré
sa vie à l’éducation d’enfants autistes.
Elle a d’ailleurs publié un ouvrage
sur le sujet dont vous trouverez les
références en fin de texte.
Texte pour laisser une trace…
sur un battement de cil
J’écris pour faire parler ce qui peut prendre corps …
en silence d’abord… Je laisse parler mes points de suspension…
pour laisser une place, un espace entre deux pensées…
Je souligne, par un signe, ce qui est important, ce qui se lit
entre les lettres, derrière les phrases. Sous l’apparence du
mot ou de l’image il y a l’essentiel : une respiration,
la mienne, la vôtre.
Alors l’écriture se compose comme un paysage
Comme une méditation….au dedans de soi même.
…Un regard simplement … posé près de chez moi, sur le bord
du chemin où je m’attarde un instant… en retenant l’automne.
Il parle silencieusement d’un églantier solitaire nu et fier qui attend
d’être touché par l’oiseau, pour lui offrir ses graines avant l’hiver.
L’oiseau partira en voyage, l’églantier revivra un printemps
dans un autre paysage, sans renoncer à ses racines…
J’apprécie l’ambiance recueillie de l’automne, quand les
feuilles tombées du tilleul, à côté de la maison se recroquevillent
«…comme un cœur se resserre autour du souvenir de ce qu’il
a perdu…». Quand les parfums d’humus, fertilisent la terre de toutes
ses nostalgies. En un seul instant, et à tout moment,
patiemment, la vie s’applique à transformer nos paysages.
Alors Le temps d’une nuit blanche…J’écris pour une PRESENCE…
Pour un moment, un mot. Pour un instant seulement, un geste.
J’ai pris un rendez-vous avec moi, rendez-vous avec nous, avec vous.
Avec toi.
J’ai souvent des rendez-vous avec le doute, et, dans ces moments là,
Je me dépêche d’agir, de penser, pour éviter le vide,
Contourner l’inconnu, combler la peur.
J’observe alors que mon esprit s’agite, mon corps perd pieds.
Alors les mots servent à me cacher plutôt qu’à me dire, mon corps
s’absente.
Et, dans ses moments là, il s’oublie, reste sans voix.
Alors je voudrais être muette, faire silence, laisser une place.
Et, simplement, pour un instant, ouvrir les yeux, les oreilles et le cœur,
Pour un moment, pour un instant seulement… … être là.
Il y a des moments, où je voudrais être tortue, trimbaler
mon univers sur mes épaules. Pouvoir m’y réfugier,
Comme dans une huître hermétique, rivée sur son rocher.
Mais, dans ses moments là, Mon abri est sans fenêtre, sans lumière.
Ma voix sans écho, raisonne en vain et je n’ai faim de rien.
Alors je voudrais être ailleurs, sans savoir vraiment où.
Peu importe le lieu, mais près d’un être cher,
Qui puisse m’entendre sans que j’aie à parler !
Ecouter mes silences, mes larmes ou mes pensées,
Sans qu’elles soient justifiées, ni même qu’elles se comprennent… …
Il y a des moments… où je doute d’exister…
Et quand je me questionne, personne ne me réponds.
Alors parfois je me regarde à la dérobée, dans les yeux des autres.
Je m’écoute à travers leurs paroles,
Et, je nous reconnais, dans nos histoires, nos gestes, nos mots.
C’est autant d’éclairages sur mes ombres endormies.
Dans ces moments là, c’est moi que je rencontre, par l’autre
qui se révèle. Alors j’ai rendez-vous avec moi, avec toi avec nous .
Il y a des moments où l’autre me réveille en me parlant de lui.
Et je partage ses bonheurs, ses blessures et ses doutes.
Alors mon corps entend des parcelles de lui-même,
Et mes larmes se colorent d’un instant de lumière
Il y a des moments qui s’animent et renaissent
D’une présence silencieuse…. solidaire.
Alors j’accepte,
J’accepte de regarder la nuit, car j’y vois aussi ce qui luit
Tout ceci pour vous dire merci,
Car les barreaux du doute prennent des tons pastel.
Il y aura encore des nuits sans étoile, et des jours aussi sans soleil.
Mais je lutterai moins longtemps, moins souvent.
N’y a t-il pas un plus et un moins pour que la lumière soit ?
Un instant seulement où l’aube laissera monter
La légèreté de l’air, avec l’élan d’un nouveau matin
Il y aura toujours un printemps,
Pour réveiller l’hiver,
Mais un hiver aussi pour recueillir, dans les nuits froides de la terre,
Dans la nuit la plus sombre, le cristal sait, au cœur de la matière
La semence de demain
Qu’il fait danser toutes les couleurs de la lumière
Par un simple rayon qui peut le traverser
Dans un instant,
Un instant seulement…
D’arc-en-ciel.
Si je pleure parfois, c’est aussi de bonheur…
Le bonheur d’entendre la plume crisser sur la page blanche
Et courir dans la joie vers les mots encore en silence à l’intérieur,
Au-dedans de moi-même.
Une partie de ce que nous retenons par peur,
C’est souvent le meilleur de nous – même :
Notre désir de vivre, d’aimer et de créer.
Après cette nuit blanche, j’écris face au soleil d’un matin d’émotions
Ses rayons me transpercent,
Je les laisse caresser mon âme d’une chaleur irradiante…
Blanches seront toutes les nuits qui pourront me faire écrire,
Et ainsi noircir les feuilles vierges de mon inspiration…
Pour une méditation,
Pour un instant seulement.
De solitude pleine.
…Une présence d’émerveillement…
C’est maintenant, le bon moment…
C’est aujourd’hui que j’écris …
Dominique Paulhiac
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Pour parler d’un enfant, à « SOLSTICES » dans les années 90, l’accompagnement de la différence dans ce service… était encore, à cette époque, une invitation à prendre la parole.
« J’avais promis à Victor -l’enfant au regard du dedans, « l’autiste », comme ils avaient dit là-bas, dans son hôpital à Paris- de raconter son histoire, d’être sa mémoire. Un récit d’ici en Lozère au Bleymard.
Victor nous entrainera dans ses nuits innommables. Nous traverseront avec lui les miroirs…des origines. Etranges impressions de corps à corps en exil de soi. Comme si une part de nous-mêmes pouvait ignorer l’autre restée dans l’ombre.
Dominique Paulhiac
Ouvrage disponible Editions « Champs social » 90 rue d’Arcole à NIMES, à la Fnac et chez l’auteur 48190-Le Bleymard
Prix 14€ |