Les « damnés » de la sphère

Je ne vois rien de bon dans cet Orient terne,

Du brouillard et du sang et des drapeaux en berne

Maculés et flétris par des êtres impies

Croyant dans le néant, la nouvelle utopie.

 

C’est ce que j’écrivais, il y a quelques jours.

Ce n’est pas folichon, mais je crains qu’alentour

Ce ne soit pas meilleur. Où c’est-y l’Ossétie ? (*)

Un oukase au Caucase, ça intéresse qui ?

 

Pendant que nos sportifs font la chasse aux médailles,

Que devant nos télés, on ouvre l’éventail

De nos pieds nickelés, l’apéro bien au frais,

Le petit peuple a honte et vit à petit prêt.

 

Endetté jusqu’au cou par les marchands de rêves,

Précarité oblige, on respecte la trêve.

Finis les ouvriers. Techniciens, ils sont tous,

Au Smic évidemment et en plus on les pousse.

 

La noblesse du mot -ouvrier qualifié-

Est restée au placard de quelqu’ antiquité :

La fierté des anciens de ramener le pain

Pour nourrir la famille sur son petit lopin.

 

Bien nourris, ils le sont, les « damnés » de la sphère.

À compter leurs biftons, à redouter l’austère,

À craindre que ne craqu’ le Nasdaq ou le Cac

Et à la fin du temps, ils ne meur’nt pas, ils claquent.

 

Les petits héritiers qui se déchireront

Les restes à partager, deviendront gros et gras

Pour faire comme papa. Ils seront « trop » et rats,

Sans jamais ressentir le rouge qui monte au front.

 

De celui qui fait mal, par l’exploit d’un huissier,

Va-nu-pieds en grand’s pomp’s, avec ses gros sabots,

Nécrophag’ patenté, ce sbire des beaux baux,

Qui nous la baille belle, et nous fait bien ch…

 

Cela dit…

 

Je n’ai pas de rancœur, je n’ai pas de rancune.

Simplement je regarde et je vois, de la lune,

Que la sphère est petite et, bien qu’elle soit bleue,

 On dirait un bateau qui vogue dans les cieux.

(*)En Picard, dans le texte

 

Jean-Charles Theillac